1. Du moyen tiré de l’absence de fondement juridique

« Cette loi n’a pas fait l’objet d’une publication conformément aux dispositions de l’article 58 de la Charte qui dispose que « le Président de la Transition procède à la promulgation de l’acte de révision ».
L’auteur confond et mélange dans la même phrase « publication » et «promulgation».

Il convient donc de rappeler que la publication est « l’action de porter un acte législatif ou administratif…, le plus souvent de portée générale, à la connaissance du public, normalement par son insertion dans un périodique officiel » (G. CORNU, Vocabulaire juridique,822).

Quant à la promulgation, il s’agit de la «déclaration officielle intervenant après l’élaboration d’une loi (ou parfois la signature d’un traité) qui préside à l’insertion de cet acte dans l’ordre juridique et conditionne son entrée en vigueur sous réserve de la publication à intervenir… Décret par lequel le Chef de l’Etat constate que la procédure d’élaboration de la loi a été régulièrement accomplie et rend exécutoire, comme loi de l’Etat, le texte ainsi adopté par le Parlement » (G. CORNU, Vocabulaire juridique,810).
On aura compris que ce qui donne force juridique à la loi, c’est la promulgation et non la publication qui du reste est à venir dans le prochain Journal Officiel. Or dans le cas d’espèce, la loi a été parfaitement promulguée par un décret du Président de la Transition (Décret n° 0016/PT/PR du 6 octobre 2023).

L’auteur de la requête affirme ensuite que l’initiative de la révision de la Charte appartient concurremment au Président de la Transition et au 1/3 des membres du Parlement et son adoption se ferait à la majorité des 4/5 des membres du Parlement.
Nul ne sait de quelle Charte parle l’auteur de la requête car, aux termes de l’article 58 de la Charte enregistrée au service de l’enregistrement de la Présidence de la République (Ordonnance n° 0003 du 2 septembre 2023 portant Charte de la Transition) et publiée dans le journal l’Union (Mémorandum de la Transition), l’initiative de la révision appartient au Président de la Transition et aux membres des Bureaux qui l’adoptent à la majorité des 4/5 des membres du Bureaux.

Il n’est pas utile de répondre aux autres points de ce premier moyen.

2. Du moyen tiré de l’absence de consultation du Conseil des Ministres

L’auteur de la requête affirme que le décret de promulgation comme le décret de nomination doivent être délibérés en Conseil des Ministres.
Les décrets de promulgation sont des actes propres au Président de la République. Ils n’ont pas de contreseing et n’ont aucune raison d’être délibérés en Conseil des Ministres.
Quant au décret de nomination des Députés et Sénateurs prévus par la Charte de Transition, il est aisé de comprendre que ces nominations n’ont strictement rien à voir avec les nominations aux emplois publics qui sont délibérés en Conseil des Ministres. A cet égard, se référer à la Constitution sous prétexte de silence de la Charte est une pure hérésie car dans la Constitution, les Députés et Sénateurs ne sont pas nommés par le Président de la République, mais élus !

3. Du moyen tiré de l’absence de publication au Journal Officiel

L’auteur de la requête soulève ici un moyen qu’il a déjà confusément soulevé au point 1 : celui de la publication.
On rappellera donc que ce qui donne force juridique à une loi, c’est sa promulgation par décret du Président de la République et non sa publication dans le Journal Officiel. Lequel Journal Officiel peut aujourd’hui paraître dans les jours ou heures suivant la promulgation, alors qu’il y a quelques années, avant la révolution informatique, le Journal Officiel paraissait des semaines voire des mois après la promulgation.

C’est, enfin, le lieu de rappeler que si la publication au Journal Officiel est la forme habituelle de publication, elle n’est pas la seule. A cet égard, il suffit pour s’en convaincre d’examiner l’article final des décrets querellés : « LE PRESENT DECRET SERA ENREGISTRE, PUBLIE SELON LA PROCEDURE D’URGENCE ET COMMUNIQUE PARTOUT OU BESOIN SERA », notamment par le biais des communiqués du CTRI que contestent l’auteur de la requête.