Avec une facilité exceptionnelle de 25 milliards de FCFA accordée par l’État, la BCEG frappe fort pour redonner des couleurs au secteur halieutique. L’objectif ? Transformer les pêcheurs artisanaux en entrepreneurs formés, financés et formalisés. Décryptage d’un modèle qui pourrait redessiner le visage économique du Gabon.
Libreville, 14 juillet 2025. Ce n’était pas un simple séminaire technique. C’était un tournant. Dans la salle de conférence du ministère des Eaux et Forêts, ministres, banquiers et acteurs du secteur halieutique ont levé le rideau sur une offensive inédite portée par la Banque pour le commerce et l’entrepreneuriat du Gabon (BCEG). Au cœur de l’opération : une enveloppe de 25 milliards FCFA injectée par l’État pour dynamiser la pêche artisanale. Et surtout, une méthode aux antipodes des logiques de crédit classiques.
« Le crédit ne suffit plus. Il faut construire un écosystème entrepreneurial solide autour des bénéficiaires », martèle Daisy-Helen Eyang Ntoutoume, DG de la BCEG. Avec le programme Gab Pêche et ses “ateliers PME”, la banque veut proposer un accompagnement sur-mesure : formations à la gestion, kits de démarrage, suivi financier régulier, insertion dans les circuits formels… Le tout avec un taux d’intérêt défiant toute concurrence : 6 %.
Une révolution “avant-après crédit”
Ce n’est pas juste une question d’argent. Le modèle repose sur une logique “avant-après crédit” : évaluer la viabilité du projet en amont, accompagner l’entrepreneur dans sa croissance, puis pérenniser l’activité avec des outils de suivi. Pour en bénéficier, les bénéficiaires devront faire transiter leurs revenus par la BCEG, gage de transparence et de traçabilité. Une exigence qui vise à rompre avec l’informel dominant.
L’initiative traduit aussi la vision stratégique du président Brice Clotaire Oligui Nguema : faire du financement de l’économie réelle un levier central de transformation. Et dans un pays où le secteur halieutique reste largement sous-exploité malgré ses immenses potentialités, cette injection de capital structuré pourrait bien changer la donne.
Une stratégie pensée pour durer
Au-delà de la pêche, la BCEG envisage déjà d’étendre le modèle à d’autres secteurs stratégiques : agriculture, agro-industrie, artisanat, énergies renouvelables. « Ce que nous bâtissons, c’est un tissu entrepreneurial robuste, capable de créer de la valeur et de l’emploi dans toutes les provinces », explique un conseiller économique du gouvernement.
L’ambition est claire : faire du Gabon un pays où les micro-activités basculent vers la formalisation, où les PME locales accèdent au financement sans se heurter aux barrières traditionnelles, et où l’inclusion financière devient un moteur de croissance.
Une banque, une mission
Dans un environnement bancaire encore frileux face aux profils dits “à risque”, la BCEG se positionne en pionnière. Elle endosse le rôle de catalyseur d’un nouveau contrat social et économique, où chaque acteur de terrain peut prétendre à sa place dans l’économie formelle. Le défi est immense, mais les bases semblent solides.
Le Gabon pourra-t-il capitaliser sur cette dynamique pour impulser un développement endogène et durable ? Si le pari est tenu, le secteur halieutique ne sera plus un maillon faible, mais une vitrine d’un modèle économique réinventé.





