Voici plus d’un mois que le Chef de l’État s’est exprimé devant le parlement réuni en congrès. S’il a salué un certain nombre de réformes engagées sur le plan constitutionnel, il a surtout révélé les conclusions de l’autopsie faite sur son dispositif politique. Il en ressort que certaines personnalités de son camp aient décidé de faire allégeance à de nouvelles ambitions completement déconnectées.

Après une telle lecture publique qui ne souffrait d’aucune ambiguïté, les mots  » agendas cachés «  ayant quand même été prononcés, un chamboulement conséquent s’impose pour joindre l’utile à l’agréable. Autrement dit, si Ali Bongo Ondimba souhaite donner de l’épaisseur et de la résonnance à son discours, il ne peut laisser les choses autour de lui en l’état, à deux ans d’une élection présidentielle qui s’annonce rude.

Albert Schweitzer disait « l’exemplarité n’est pas une façon d’influencer les autres. C’est la seule ». Donc, le Chef de l’État devrait commencer par revoir en profondeur son cabinet dont le rôle d’interface entre le monde politique et l’administration semble méconnu ou mal rempli. Les attaques récurrentes contre le président de la République et les plaintes justifiées du peuple impatient en font foi. C’est dire que l’ancien syndicaliste de l’ONEP ne fait pas l’affaire. Comme quoi, la critique est aisée et l’art bien difficile.

Il en est de même pour le gouvernement. Son bilan présenté par deux experts, un économiste et un juriste, vient d’être validé par le silence étonnant des concernés. Trois semaines après sa publication, c’est le silence qui continue de régner du côté de la primature où on compte pourtant une bagatelle de conseillers. A quoi servent-ils finalement?

Tout dans la vie étant symbole, on peut déjà conclure qu’avec cette équipe gouvernementale, ce silence sera toujours au rendez-vous toutes les fois où le président de la République sera fragilisé par les attaques de ses adversaires. Voici une raison supplémentaire pour le Chef de l’État de suivre le conseil de Laurent Fabius à François Hollande:  » un remaniement gouvernemental, à l’approche d’une élection présidentielle, n’a de sens que lorsqu’on change de premier ministre « .

C’est d’ailleurs ce qui avait suscité le départ de Jean Marc Ayrault et la nomination de Manuel Valls à Matignon, lui qui avait été porte-parole du candidat au moment de l’élection présidentielle. Le temps est désormais compté. Et ça, François Mitterrand l’avait bien compris. C’est pourquoi, faire dans le cosmétique de type Edith Cresson, la première et unique femme premier ministre en France ne pouvait durer. Faire dix mois et dix-huit jours à Matignon était déjà trop. C’est dire…

On imagine mal un Alain Claude Bilie- by-Nzé ou un Guy Bertrand Mapangou à ce poste se taire face à une telle agression publique. Car il s’agit là, et avant tout, d’une question d’honneur et de dignité personnel avant d’être celle du Chef de l’État qu’on dit servir.

Si déjà c’est le silence qu’on invite sur la place publique pour défendre le bilan d’une seule année de travail, qu’en sera-t-il dans un contexte électoral, lorsqu’il faudra vendre tout le septennat, face à des fauves politiques comme Guy Nzouba Ndama, Alexandre Barro Chambrier, Paulette Missambo, Paul Marie Gondjout ou Mike Jocktane?

Si Ali Bongo Ondimba entend être le candidat de son camp politique en 2023, il est important qu’il évalue bien le peu de temps qui lui reste pour donner un sens à son discours tenu devant les Parlementaires. Avec une élection présidentielle à deux tours, toutes les alliances improbables se feront du côté de l’opposition pour atteindre l’alternance. Mais ce ne sera ni avec ce cabinet, sans colonne vertébrale, et encore moins avec ce gouvernement, sans voix et sans corps, qu’il pourra espérer franchir la barre des 50% au premier tour.

La montre tourne et les secondes qui restent coûteront trop chères, passée la fête nationale. Les opposants mesurent la faiblesse du dispositif actuel et les failles qui ne cessent de se multiplier. Ce qui est un vrai danger.

Par Télesphore Obame Ngomo