En cette journée du 5 juin déclarée Journée Mondiale de l’Environnement, l’Afrique ne saurait continuer à briller par des postures afroidéalistes dont les effets demeurent de la paperasse et la création spontanée d’organisations budgétivores. Si le thème de cette année est celui de l’impact de la pollution plastique, l’Afrique devrait pouvoir y trouver son « Kant à soi ». En effet, l’heure n’est plus à l’organisation des sommets et autres assises « inutiles » car les faits parlent d’eux-mêmes et traduisent avec une certaine pertinence, notre incapacité, non pas à réfléchir, mais plutôt à traduire en actes la beauté de la pensée africaine selon qu’elle sache produire de la richesse à partir de l’environnement.

Des bases, peut-être ambiguës, mais sensées.

De nombreux combats ont émaillé la vie du continent, de l’OUA à nos jours (UA). Cependant, si l’heure est au bilan, il y a lieu de faire par ailleurs un constat. 60 ans « d’Unité Africaine » après, sur quels plans l’Afrique a-t-elle pu au moins démarrée, si la chercher en place de 1ere devant les autres continents pourrait paraître prétentieux ? Toutefois, nous y reviendront au cours de prochaines réflexions.
Pour l’heure, nous nous attelons à postuler une Afrique forte à partir de l’économie de l’africanisation de la pensée, pensée vue comme élément fondateur de toute civilisation dont les marques structurent le vivre ensemble universel.
En référence à la Charte de la Renaissance Culturelle Africaine de 2007, ainsi qu’à l’Agenda 2063 qui inspire « l’Afrique que nous voulons », on serait tenté de reconnaitre que le continent fait une fois de plus l’erreur de ne pas comprendre les lieux de notre échec, à partir de notre état de misère, de pauvreté et de sous-développement.
A-t-on, ne serait-ce qu’infimement, cerner le potentiel économique de l’Afrique dans sa grande diversité ? Entre traditions, cultures, savoirs endogènes et autres marques de notre historicité, le débat devrait être aujourd’hui celui qui consiste à donner du corps à vendre aux secteurs dont nos ancêtres nous ont légué l’inextricable savoir-faire. Il ne fait aucun doute que l’amour développé pour les sciences importées a fini par faire de l’Afrique, un vaste espace de misère et nous en sommes tellement attachés que nous ne sommes plus capable de voir les opportunités qui sont les nôtres et qui ont fait rayonné « l’Afrique grenier du monde » à une époque.
De la valeur économique ignorée ou sous-exploitée
Aujourd’hui, bien heureusement ou non, l’Afrique est moderne et profite en effet des évolutions technologiques de ce siècle, et, ce n’est pas faute de le dire, elle y participe, bien que petitement.

Nous pourrions donc commencer par des réformes courageuses et fortes à l’exemple du Rwanda il y a quelque temps, qui dans le courage et l’audace inspirés du souci de grandir, a suspendu certaines disciplines de son enseignement universitaire jugées dans le contexte actuel complètement peu productives, et repenser le contenu des formations de l’Université Panafricaine tout en impulsant la même dynamique au sein des États-membres de l’UA. Cela est en effet possible avec un petit peu de volonté politique, mais encore avec l’accompagnement adéquat pour les acteurs de ce système (chercheurs, enseignants, maitres traditionnels et dépositaires des savoir-faire du terroir) afin que ces derniers puissent clairement mettre en relief la charge économique de ce patrimoine.
Si l’économie est ce qui nous manque, attelons-nous à nous former sur le potentiel et la valeur économique de notre patrimoine culturel, social et donc touristique.

Au constat, on note que les musées européens sont gorgés de notre richesse culturo-traditionnelle mais étrangement, nous ne sommes pas nous-mêmes capable d’en faire autant, et même mieux.
Récemment, un masque gabonais a été vendu à plusieurs millions de franc CFA au profit du colonisateur et là encore, nous avons brillé par notre incapacité à comprendre l’opportunité de conceptualiser l’urgence d’une irréversible capacité économique pour le continent tout entier.

De la création de richesses

En érigeant des musées d’art culturel et traditionnel, comprend-t-on seulement l’immense production de richesse qui s’y cache ? Le laboureur ne disait-il pas à ses enfants de chercher sans cesse le trésor caché et de ne le vendre sous aucun prétexte ? Que faisons-nous de cette fable si durement apprise au prix du fouet ou de la très regrettée chicotte ?

Un musée nécessite un personnel et une main d’œuvre que nous avons à foison et dont l’action ne sera que bénéfique pour la réduction du taux de chômage, de violence, de la délinquance, du grand crime, de la prostitution, l’exode et l’immigration clandestine et meurtrière qui vide l’Afrique de ses plus vaillants enfants, et de la pauvreté dans laquelle se vautrent paradoxalement nos États, la jeunesse étant dans ce contexte, étrangement, la plus nombreuse et la plus vulnérable.
Entre l’entretien et la création d’œuvres d’art ou autres œuvres de l’esprit, matériel ou immatériel, nous avons là une énorme potentialité économique axée sur le tourisme culturel et développementaliste.

Par ailleurs, le flux des diplômés sortis de nos universités et grandes écoles aura enfin la possibilité de mettre au service du développement de nos États, le savoir qu’ils ont reçu de nos fameux « Temples de Savoirs ».
Entre billets d’avion, séjours aux hôtels, restauration, transport et guide touristique, accès aux musées, la vente des créations…, il ne fait aucun doute que l’africanisation de la pensée intègre les capacités de résilience de l’Afrique. Il y va de notre potentiel réaliste.

Yvan Comlan OWOULA BOSSOU, Chercheur en Histoire des Relations Internationales/DHA-CREHA/UOB. comlano90@gmail.com

Yvan Comlan OWOULA BOSSOU, Chercheur en Histoire des Relations Internationales/DHA-CREHA/UOB. comlano90@gmail.com