Editorial par Joseph Mabimba 
En comité réduit, un gros gâteau est partagé à huis clos, loin des regards indiscrets. Interdiction aux jaloux de lorgner vers la caverne d’Ali Baba, selon la décision de la Cour de Toulon.
Le pays doit se préparer à une catastrophe imminente selon les prévisionnistes européens les plus pointus. Quel dommage pour un petit pays aussi charmant !
Une catastrophe sanitaire en pleine sècheresse financière ? Dieu merci, la coopération internationale est agissante. Les amis traditionnels du pays aux mille charmes partagent la même émotion, bien qu’ils soient eux-mêmes aux abois, confrontés à une COVID-19 implacablement meurtrier. Le nerf de la guerre est mis à disposition. Qui pour animer le COPIL ? Un couvre-feu et un confinement constituent la boucle de la boucle. Mesdames, messieurs, c’est parti pour deux mois, non trois mois. He oui, on va encore faire comment! Trois mois secs sous leurs masques appelés touracos, toucan, bavettes…
On sait que la maladie et la misère ne font pas bon ménage. Pendant qu’on crève au quartier de n’importe quoi, la vie est belle du côté de la caverne d’Ali Baba. Une vie dans la convivialité. Le COPIL s’est transformé en palace des mille et une nuits. Le gâteau est si gros qu’il faut faire attention aux cancans, la maladie pernicieuse du Grand Libreville. Celui qui n’a pas vu voit ; celui qui n’a pas entendu entend ; celui qui est muet parle. Mais pas besoin de voir, entendre et parler. Les murs les plus épais voient et parlent. A travers le huis clos d’Ali Baba, les échos de la cérémonie font le tour de la capitale sous couvre-feu et confinement. En catimini, une audience est convoquée dans la salle d’apparat de la Cour de Toulon. Les commissaires, lunettes noires, masque blanc frappé de cinq lettres, se livrent au rituel au terme duquel ils jurent devant Dieu et la Cour de ne point manger l’argent du peuple en souffrance. Tant pis si une partie du gâteau est dans le ventre ! Peu importe, seul le geste compte ! Au moins, les commissaires pourraient dire, au cas où les centaines de milliards d’oseille sont introuvables, qu’ils ont les mains blanches et le visage masqué au COVID-19. Pour une fois de l’histoire, la Cour de Toulon remplit une mission régalienne.
Pendant que les bienheureux commissaires prestent, des bruits indistincts montent des bas-fonds. Ce sont des cris de ceux à qui on refuse un rayon de soleil, des gens interdits de se livrer à la débrouille, des miséreux vivant de bouts de pain et de manioc secs. Depuis quelques mois, la mort a répandu son odeur dans les taudis et les baracons de planches et de tôle de fortune.
C’est quoi, ce tapage et ces cris incessants ? On ne peut plus dormir tranquille dans ce pays? Ô mon Afrique ! Pourtant, on a servi à la populace les bons de la banque alimentaire ! Qu’est-ce qu’ils veulent encore ? Monsieur, ils veulent vivre et ils veulent voir vivre leurs enfants affamés, malades, déscolarisés. Ils n’ont qu’à attendre ! Ne savent-ils pas lire le compteur du corona ? Qu’ils attendent en gardant la distanciation sociale ! Qu’ils attendent que le compteur marque 10.000 cas. Monsieur ! Silence…